Une vie cinématographique. Riccardo Moretti, alias Ricky, est le pilote qui a remporté le plus de courses au Championnat d’Italie de vitesse dans la catégorie 125. Il a concouru pendant 10 ans et était toujours sur le podium, souvent sur la plus haute marche.
Né à Lugo di Romagna en 1985, en tant que garçon, il semblait destiné à devenir une star du cross. A 16 ans, cependant, il a eu un très grave accident. Le diagnostic lui laissait peu d’espoir : il avait deux vertèbres émiettées, une luxation vertébrale totale et était terrifié à l’idée de devoir passer toute sa vie dans un fauteuil roulant. Riccardo Moretti a plutôt réussi à récupérer après 3 ans de rééducation très dure mais dans le cross il y avait trop de stress et il est passé à la vitesse. En 2007, il a remporté le Trophée Honda, puis s’est battu pour le podium du Championnat d’Europe, a été Champion d’Italie 2009 et Vice-Champion d’Italie en 2008 et 2012, à deux pas du titre. Riccardo Moretti a participé à 11 courses MotoGP et a ensuite travaillé pendant de nombreuses années en tant que pilote d’essai, entraîneur et technicien fédéral, mais en 2020, sa vie a de nouveau été mise à l’épreuve.
Ricky, comment se sont passées ces dernières années ?
« Difficile, très difficile ! À l’automne 2020, j’étais en promenade dans la campagne lorsqu’un chasseur m’a frappé au visage par inadvertance avec un fusil de chasse. J’ai une balle dans l’oeil. J’ai perdu la vue pendant huit mois durant lesquels j’ai dû dormir assis tout le temps pour faire reprendre l’hématome. Je ne pouvais pas m’allonger et je n’ai rien vu dans cet œil. Ma mère, qui n’est pas venue ici depuis un certain temps, travaillait à l’hôpital de Ravenne et les médecins ont pris ma situation à cœur. Le médecin-chef m’a traité comme un fils malgré les difficultés liées à l’urgence Covid. Ils m’ont proposé une intervention chirurgicale avec une méthodologie expérimentale et l’utilisation d’un gaz. Je me suis inscrit et heureusement ça s’est bien passé. J’ai dû rester tête en bas pendant dix jours mais avec le temps j’ai réussi à récupérer, maintenant je vais enfin bien ».
Entre-temps, avez-vous reçu l’appel de TM ?
« Depuis 2016, je travaillais comme pilote d’essai et technicien de l’équipe POS TM Junior et juste au moment où j’étais malade, l’officiel TM m’a demandé d’être le directeur sportif et l’entraîneur de son équipe dans le championnat du monde junior. J’étais accompagné à l’entretien car évidemment je ne pouvais pas conduire. J’ai informé l’équipe de ma condition, ça leur convenait bien, et j’ai travaillé comme DS de TM. L’année a été positive : notre pilote a terminé cinquième et TM deuxième au classement des constructeurs. À la fin de l’année, TM est parti et j’ai pris une année sabbatique des motos. J’avais besoin de reprendre mon souffle après des années difficiles ».
Qu’avez-vous fait en 2022 ?
« Je suis revenu à une ancienne passion : la mer. Maintenant, je suis skippé sur des catamarans qui transportent des touristes. L’amour des bateaux m’a été transmis par mon oncle lorsqu’il m’a posé une planche de bois quand j’étais enfant. Je ne ressens pas les frissons des motos à part peut-être quand la mer est déchaînée : dans ce cas je m’amuse mais les gens sont terrifiés ».

La moto vous manque ?
« Je ne peux pas imaginer ma vie totalement en dehors du vélo. En 2023, j’aimerais reprendre le travail en tant que technicien fédéral, en tant qu’entraîneur, sans complètement quitter la mer. En hiver, j’aimerais continuer à travailler comme skipper aux Canaries ».
Jetons un coup d’œil à votre passé de pilote. Avez-vous le regret de ne pas avoir disputé à plein temps le Championnat du Monde ?
« Non, zéro ripanti ! Tout ce que j’ai réussi à accomplir dans la vie, c’est uniquement grâce à moi-même, ma force, je me suis fait à partir de rien. À 17 ans, j’étais en fauteuil roulant alors qu’à 21 ans, j’étais champion d’Italie et dans ces années-là, il y avait des gens forts comme Savadori, Tonucci et d’autres. J’ai longtemps couru en CIV grâce à mes compétences de pilote d’essai car je n’avais pas d’argent. Je n’ai pas couru à plein temps dans le Championnat du Monde pour des raisons de budget et d’âge mais quand j’en ai eu l’occasion, j’ai fait valoir mon point de vue ».
Vous manquait-il également des bonnes connaissances ?
« Disons qu’à certains moments je n’ai pas trouvé de gens trop honnêtes sur mon chemin sinon, peut-être, j’aurais pu aller en Coupe du monde mais je ne pense plus à ces choses-là. J’ai eu une belle carrière de pilote d’essai, j’ai travaillé sur le développement de beaucoup de motos, j’ai donné à Mahindra ses premiers succès et ça va. Peut-être que ma limite était celle de ne pas avoir été assez… sociale et de caractère. Arrivé sur la piste, j’ai éteint mon portable et je ne l’ai rallumé que dimanche soir. J’aimais être en compagnie, faire du bien à mes côtés mais je me souciais peu de tout le reste. Je suis comme ça, joyeux et ensoleillé, simplement moi-même ».